La production laitière en Suisse est au bord du débordement. Si des mesures rapides ne sont pas mises en œuvre à court terme, le prix du lait, notamment d’industrie, s’effondrera au printemps prochain. Les prévisions pour le début de l’année 2026 du principal acheteur de lait de la région – la coopérative Mooh – donnent froid dans le dos. Notre région périphérique est particulièrement touchée. La situation temporaire exige des mesures exceptionnelles mises en place pour ne perdre ni producteurs ni troupeaux. La solution d’abattage en masse n’est pas une solution. Il en va du maintien d’un terroir et d’une source de plus-value importante pour nos familles paysannes.
Si l’année agricole 2025 est bonne jusqu’à aujourd’hui – les récoltes en production végétale et fourragère sont excellentes en quantité et en qualité –, la principale branche de production de l’agriculture jurassienne est sous forte pression. Les annonces de prix pour le lait d’industrie des prochains mois sont catastrophiques. Les producteurs devraient produire à perte, largement en dessous des coûts de production. Le salaire horaire – à 12 CHF/heure en moyenne nationale – est pourtant déjà extrêmement bas dans le secteur. De tels prix du lait n’ont plus été vus depuis une décennie et la crise de 2015. Pronostiqués à 52 centimes par Mooh pour mars et avril 2026, ils retomberaient à un niveau indécent. AgriJura ne peut se satisfaire de cette situation et demande des mesures exceptionnelles.
Si le marché laitier est effectivement sous tension avec une offre en forte hausse en comparaison annuelle, il est nécessaire de remettre les chiffres en perspective. La fin de l’année 2024, avec la crise de la langue bleue et des fourrages de piètre qualité, avait limité le potentiel de production. Le retour en santé des vaches laitières jurassiennes et les excellents fourrages devraient ainsi être source de réjouissance pour nos producteurs. C’est pourtant tout le contraire. Du côté de la demande, si nos voisins produisent également plus de lait, mettant sous pression le prix suisse, la demande reste bonne mais chancelante. À l’instar du Gruyère AOP, qui a vu ses exportations reculer de 12 % depuis le début de l’année (-642 tonnes vers les USA depuis janvier), les droits de douane américains à 39 % frappent de plein fouet les produits suisses, concurrencés, à titre d’exemple, par un Comté renchéri, lui, uniquement de 15 % aux USA.
Dans ce contexte, les solutions ne peuvent résider dans l’abattage de nombreux animaux, quand bien même les prix de la viande sont élevés. Le maintien d’un cheptel, qui a vu ses vêlages baisser de 6 % à cause de la langue bleue jusqu’en septembre, et la mise en valeur de nos herbages en Suisse passent par d’autres mesures de dégagement du marché. L’économie de l’Arc jurassien est soutenue jusqu’à Berne et mise à l’arrêt temporaire à grands coups de RHT. Défavorisée par le système actuel, comme les autres régions périphériques, la production laitière jurassienne mérite le même soutien dans cette crise conjoncturelle.
https://www.rfj.ch/rfj/Actualite/Region/20251017-AgriJura-alerte-sur-le-niveau-du-prix-du-lait.html
https://www.lqj.ch/articles/le-prix-du-lait-menace-de-seffondrer-dans-le-jura-120657